Feu d’artifice à la Cartoucherie
de Vincennes
Le jeune roi de Navarre et ses trois compagnons, Biron, Longueville et Dumaine, font le serment de renoncer à l’amour pour consacrer à leurs études les trois prochaines années de leur existence. Ce serment sera mis en péril à l’arrivée de la princesse de France et de ses trois suivantes, Rosaline, Catherine et Maria.
Du Shakespeare ciselé, porté par des voix puissantes, remarquablement soutenu par la diction imposante du roi Ferdinand (Alexandre Zloto). Très belle et forte présence par ailleurs des têtes couronnées, suivies de leurs gouleyants acolytes, lestés d’une gracieuse sensualité côté dames.
Les couples se choisissent dès la première rencontre et n’auront de cesse de se chercher sans se toucher. Alors on court, on crie, on espionne, on se frôle, on se moque, on se gausse, on se jauge, on se renifle, on se tait en pouffant, on se tourne autour, et autour de ce charmant dadais de Boyet (Dan Kostenbaum) à la voix de crooner.
© Thérèse Gacon
Les rires fusent, les gags répondent aux pitreries. On entend aussi quelques obscénités traitées sur le mode burlesque, notamment dans le spectacle donné en seconde partie par Holopherne (Emmanuelle Bourdier) et Nathaniel (Davis Baqué) : la scène du zizi fait hurler de rire les plus jeunes et les marquera irrémédiablement du sceau du théâtre grâce à Courge (Nicolas Vallet). La palme revient à ce personnage, dont les mimiques provoquent des gémissements de compassion dans le public. Il est touchant, il est attendrissant, il est savoureux, et le couple qu’il forme avec Jacquinette (Julie Autissier) est un régal.
Les corps s’emballent, s’enroulent, s’enlacent, se heurtent et s’entrechoquent sous prétexte de danse. L’éclectisme musical illustre bien l’ambivalence des sentiments de ces adolescents torturés par leurs pulsions et la bienséance à laquelle il faudrait se tenir. Les chorégraphies sont alertes et piquantes, et le désir contenu s’exprime dans les corps qui se tordent et l’humour de leurs pirouettes. Rosaline (Maria Kiran) et Beronne (Franck Saurel) en donnent une brillante démonstration en fin de première partie.
Beaucoup de rire, d’émotion et d’enthousiasme dans l’inconfort douillet du Théâtre du Soleil. Le spectacle est joyeux, enlevé et espiègle à l’image de ses talentueux interprètes. Bref, Shakespeare s’éclate à la Cartoucherie de Vincennes. ¶
Mylène Larchevêque
Les Trois Coups
Peines d’amour perdues, d’après Shakespeare
L’Instant d’une résonance • 53, rue du Général-Leclerc • 78570 Andresy
Traduction et adaptation : Ariane Bégoin
Mise en scène : Hélène Cinque
Avec : Charlotte Andres, Maria Kiran, Christine Hooper, Camille Hakoune, Dan Kostenbaum, Alexandre Zloto, Franck Saurel, Charles Gonon, Mathieu Coblentz, David Levadoux, Julie Autissier, Nicolas Vallet, David Baqué, Emmanuelle Bourdier, Victor Arancio
Chorégraphies : Marie Barbottin
Scénographie : Deborah Zloto, Milie Shaham
Construction décors : Frank Saurel, David Levadoux
Lumières : Pierre Martin, Jean-Philippe Morin
Costumes : Cécile Gacon, Rachèle Raoult
Musique : Jean-Philippe Audin, Pierre Martin, Julien Valakou
Production|diffusion : Élise Nerrant
Théâtre du Soleil • Cartoucherie • route du Champ-de-Manœuvre • 75012 Paris
Mº Château-de-Vincennes, ligne 1 et navette gratuite ou bus 112
Réservations : 01 43 98 26 10
Du 25 janvier au 10 février 2008 et du 18 au 29 juin 2008
Du mardi au vendredi à 20 h, le samedi à 15 h et 20 h, le dimanche à 15 h
Dimanche 10 février 2008 à 20 h
Durée : 2 h 20, entracte 30 min
15 € | 12 € | 8 €