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8 janvier 2009 4 08 /01 /janvier /2009 16:20

L’île de la dépravation

 

Une dizaine d’enfants britanniques rescapés d’un accident d’avion sur une île déserte s’invente une société pour survivre. Chacun se raccrochant à ses maigres valeurs, deux « courants » s’opposent bientôt : ceux qui veulent « faire couler le sang du cochon » et ceux qui veulent faire des assemblées. Texte un peu schématique, soucieux de faire fonctionner son allégorie sans plus de finesse, mais servi avec une énergie et une invention réjouissantes.

 

Lorsque Ralph et un gamin asthmatique et myope de son âge se découvrent rescapés d’un accident d’avion, ils ne savent rien et sont perdus : plus personne n’est là pour leur dire quoi faire. Ils trouvent une conque, et Ralph, en soufflant dedans, sonne ainsi le rassemblement des rescapés, tous des enfants ou jeunes adolescents – des garçons. Ils doivent s’organiser pour survivre et attendre des secours : tel est l’avis de Ralph. Mais Jack, chef de chorale et aspirant chef tout court, a une autre envie, car en effet : plus personne n’est là pour dire quoi faire !


L’intrigue est cousue de fil blanc. Il y a assez peu matière à surprise. Et c’est sans doute le principal défaut de cette adaptation : ce qui motive ces enfants, ce qui les fait basculer de la civilisation à la barbarie reste caché, mystérieux, et au final très superficiel. On a juste le sentiment qu’ils jouent, qu’ils ne se rendent pas compte, qu’ils sont fous peut-être. Mais comment ils deviennent fous, comment leur pensée en pleine formation est déviée par cette situation exceptionnelle, ceci échappe complètement au spectateur.

 

© Steve Wells

 

Le premier acte est de ce point de vue tout à fait réussi. On découvre les enfants en même temps qu’ils se découvrent. Rien n’est tracé encore, même si on comprend très vite quels seront les leaders et les suiveurs. Mais cette hésitation dans leur destin est assez belle à voir, de même que la façon dont ils se construisent des règles, un semblant de société : en jouant. C’est là que le talent des comédiens et l’audace de la scénographie s’expriment dans toute leur splendeur : acrobates, grimpeurs, danseurs, chanteurs, ils investissent avec fluidité et joie cet espace, qui ressemble à un parcours de santé, mais assez exigu pour onze grands gaillards. On rit beaucoup, et il faut reconnaître qu’ils réussissent alors à nous capter pour ne plus nous lâcher. Le rythme est maîtrisé, tout ceci ressemble à une belle chorégraphie, et se laisse voir avec bonheur.


Mais l’angoisse, la peur de ces enfants, est assez peu concrète. L’île manque de réalité. Les fruits, les plages, les monstres vont et viennent dans le regard des protagonistes sans vraiment se distinguer. On dirait que l’essentiel est de jouer, dans une frivolité toujours plus affirmée, ce qui rend le propos très naïf, donc assez peu convaincant. C’est pourtant un très bon moment qui se passe en la compagnie de ces jeunes comédiens très énergiques. Chacun développe une belle liberté et des personnages attachants, au service d’une histoire qui reste merveilleuse. 


Hervé Charton

Les Trois Coups

www.lestroiscoups.com


Sa majesté des mouches, de William Golding

Les Tréteaux de la Pleine-Lune • 142, avenue Charles-de-Gaulle • 92200 Neuilly-sur-Scène

Adaptation : Nigel Williams

Traduction : Ahmed Madani

Mise en scène : Ned Grujic

Avec : François Berdeaux, Sébastien Bergery, Karim Hammiche, Emmanuel Leckner, Alexandre Letondeur, Thomas Marceul, Laurent Maurel, Frantz Morel A L’Huissier, Laurent Paolini ou Emmanuel Suarez, Romain Puyuelo ou Nicolas Beaucaire, Thierry Sauzé

Assistante à la mise en scène : Magali Serra

Scénographie : Danièle Rozier

Costumes : Éric le Goff

Lumières : Antonio de Carvalho, assisté de Véronique Guideveaux

Chef de chœur : Marie-Pierre Lesur

Chorégraphie : Raphaël Kaney-Duverger

Maquillages : Solange Beauvineau

Régie générale : Yann Boutigny-Lizerand

Chargée de diffusion : Isabelle Ballant

Théâtre 13 • 103 A, boulevard Auguste-Blanqui • 75013 Paris

Réservations : 01 45 88 62 22

Du 6 janvier au 15 février 2009, les mardi, mercredi et vendredi à 20 h 30, les jeudi et samedi à 19 h 30, dimanche à 15 h 30

Durée : 1 h 50

22 € | 15 € (13 € le 13 de chaque mois)

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