À la recherche de « Paola Blue »
Le Théâtre de l’Intervalle est un lieu surprenant. Perché sur les hauteurs de Croix-Paquet, il est cependant difficile à dénicher. Après une déambulation agréable au cœur du quartier sympathique qui l’abrite, je me réjouis de tomber, par hasard, sur une minuscule salle dont le charme pousse à la découverte. Elle sera pourtant, ce soir, plus que décevante.
Paola blue de la Desnuda Company nous est présenté comme un spectacle « rétrocontemporain » mêlant danse, théâtre et vidéo : le pari est grand. Cependant l’ambition de cette jeune compagnie lyonnaise, qui décide de tout combiner pour fabriquer un théâtre nouveau et pluridisciplinaire, m’intrigue grandement. Le terme de rétrocontemporain me pose problème aussi : ne serait-ce pas un oxymore ? La présentation est floue tout comme cette création, malheureusement.
Le spectacle est entièrement consacré à la vie d’une femme, chanteuse de music-hall originale, dont on n’apprend finalement que peu de choses. Seules des réminiscences sensibles nous rattachent à celle qui m’est inconnue et qui le restera. Peut être est-ce, plus largement, un spectacle sur la femme, sa pluralité, son ambiguïté. La recherche d’une séduction devenue existentielle semble vouloir rythmer un spectacle qui en manque néanmoins. Les tentatives des trois comédiennes, pourtant impliquées, ne me touchent pas.
En effet, malgré une création lumière qui se veut intimiste, des bougies et des pétales de rose en pagaille, Paola Blue n’atteint pas la grâce poétique à laquelle il prétend. Les clichés y sont trop présents, et la confusion des genres brouille les pistes. Je me perds alors peu à peu entre les séquences dansées, chantées et trop rarement jouées. Si le spectacle n’est pas conçu pour être chronologique, il pèche par sa construction, et la succession des différents fragments de vie ne suit pas une progression sensible porteuse de sens.
La complexité de Paola Blue ne s’arrête pas là. Car, au final, il s’agit ici surtout de vidéo. La projection est le cœur d’une création quelque peu désarticulée. La scène est d’ailleurs vide, laissant une place, peut-être trop grande, à l’image. En effet, elle n’est qu’une redite de ce qui se passe sur scène ou l’illustration des émotions que le jeu offre déjà. Pourtant, la réalisation vidéo est esthétiquement intéressante, mais sa présence trop lourde n’apporte pas grand-chose au spectacle et le dessert plutôt.
Si le regard des trois comédiennes perce parfois l’opacité ambiante et apporte une certaine humanité à cet essai ambitieux, le sujet me paraît maladroitement traité, et je me lasse vite de la redondance des performances dans chaque discipline. Ces dernières restent effectivement cloisonnées : le métissage est alors hétérogène et confus. L’émulsion ne prend pas. J’étais, ce soir-là, venue rencontrer Paola Blue à L’Intervalle. Mais je ne l’ai définitivement pas trouvée et je suis repartie le cœur empreint d’un goût amer de déception face à un projet initialement palpitant. ¶
Pascaline Chambon
Les Trois Coups
Paola Blue
Desnuda Company • 8, rue Leynaud • 69001 Lyon
09 72 11 15 17 | télécopie : 09 72 11 15 17
Mise en scène : Lizzy Droulers-Poyotte
Avec : Marieke Sergent, Céline Rouch, Anne-Sophie Arnaud
Avec la participation de Fany Buy
Vidéo : Ismaël Castan
Lumières et scénographie : Laurent Leymarie
Montage son : David Rabhi | Studio Polycarpe
Costumes : Nadège Cezette | En bobine moi
Théâtre de l’Intervalle • 21, rue Royale • 69001 Lyon
Réservations : 06 17 55 36 93
Du 1er au 5 avril 2009, mercredi et jeudi à 19 h 30, vendredi et samedi à 20 h 30, dimanche à 16 h 30
10 | 14 €