Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
5 octobre 2011 3 05 /10 /octobre /2011 14:18

Précieuse maladresse
de François Morel


Par Lise Facchin

Les Trois Coups.com


Les rêves de l’enfance ne sont jamais très loin de l’homme tout comme la scène est le lieu de prédilection de la reine Mab, minuscule accoucheuse de rêves *. Mais, au feu traditions et romantismes, c’est Juliette et Antoine Sahler qui tiennent lieu de divins augures à François Morel pour son second spectacle de chanteur.

Soir-des-lions-615 franck-moreau

« Le Soir, des lions » | © Franck Moreau

François Morel à la chanson ? Aha ! Comment ne pas s’en pourlécher les babines d’avance ? On sait sa bonhomie, son talent certain pour la comédie. Mais on a également l’habitude de cette feinte simplicité, de son jeu plein de dérision ; on a encore à l’oreille sa voix nasillarde de la grande époque des Deschiens. Mais c’est un autre monde qu’il nous offre.

Au sein d’une scénographie de bric et de broc mêlant palissades de bois, caissons, loupiotes de guinguettes à une délicieuse couleur surannée, un banc. Un banc tout con, tout seul, tout brut. Et puis une radio. Côté cour, une table à maquillage avec, là aussi, quelques petites loupiotes qui concourent à donner sa chaleur à la scène. Disposés en arc de cercle, les instruments : à jardin, le piano au plus près de la scène et les percussions dans l’angle ; exactement en face, le saxophone.

Toujours un sourire sous les larmes

On dit parfois de certains spectacles qu’ils sont trop parfaits, tellement rodés qu’ils en deviennent des prouesses dont l’émotion cède un peu devant l’admiration. Avec le Soir, des lions, c’est presque le contraire. Non pas que le spectacle soit tellement imparfait que l’on en soit ému, mais certaines maladresses ne font que rajouter à la magie générale. François Morel n’est pas un chanteur confirmé, c’est un comédien qui, de surcroît, a beaucoup travaillé pour l’écran. Le projet le touche, et sa sensibilité est finalement l’acteur et le sujet du concert. Ce sont parfois, du coup, des déplacement un peu maladroits, outrés, ou une gestuelle un peu empruntée. Mais… comment dire ? Je crois qu’on s’en fout. L’enjeu est bien ailleurs.

Si les chansons sont écrites avec le cœur et un stylo, toujours entre un humour sans concession (la Fille du G.P.S., l’Éloge de la lecture) et une indignation décapante (une chanson sur la profanation d’une tombe juive par des néonazis), c’est surtout la voix de François Morel qui nous la coupe. Profonde et très bien placées, elle lui permet de nous emmener bien loin, sans heurts, tout en nuances. Il faut dire aussi qu’il n’est pas accompagné par n’importe qui… Antoine Sahler, Muriel Gastebois et Lisa Cat-Berro sont des musiciens dont le talent ne se départ jamais d’un humour teinté d’autodérision. Ils pourraient donner une sacré leçon à tant de branquignols qui peuplent les scènes des cabarets parisiens !

À un moment donné, il se passe quelque chose d’inattendu : les musiciens quittent la scène… et les lumières s’éteignent. Je n’ai pas vu le temps passer. Une heure et trente minutes en une traînée de poudre. Le spectacle s’achève pourtant, mais sans avoir omis le rappel de rigueur qui fut le dernier baiser de l’amoureux à sa fiancée avant de regagner la banalité d’une vie sans amour : un trésor trop peu connu de Georges Brassens, la Marche nuptiale, et Mourir sur scène de Dalida. Cette chanson, que nous connaissons tous, m’était toujours passé au-dessus, et je remercie François Morel de m’avoir montré qu’elle était bien autre chose que la ringardise à volants dont je me souvenais. 

Lise Facchin


* Divinité de la mythologie irlandaise.


Le Soir, des lions, de François Morel

Mise en scène : Juliette

Texte et interprétation : François Morel

Musique : Antoine Sahler et Reinhardt Wagner

Clavier : Antoine Sahler

Percussions : Muriel Gastebois

Saxophone : Lisa Cat-Berro

Costumes : Pascale Bordet

Décors : Nils Zachariasen

Lumières : Gaëlle de Malglaive, assistée d’Alain Paradis

Son : Yoan Corchia

Théâtre de la Commune • 2, rue Édouard-Poisson • 93304 Aubervilliers

01 48 33 16 16

Métro : Aubervilliers-Pantin-Quatre-Chemins (ligne 7)

Autobus : « André Karman » (150 ou 170)

Site : www.theatredelacommune.com

Du 21 au 25 septembre 2011 à 21 heures, le dimanche à 16 heures

Durée : 1 h 30

24 € | 18 € | 16 € | 12 € | 11 € | 9 € | 8 € | 5 €

Partager cet article

Repost0

commentaires

Rechercher