Le journal quotidien du spectacle vivant en France. Critiques, annonces, portraits, entretiens, Off et Festival d’Avignon depuis 1991 ! Siège à Avignon, Vaucluse, P.A.C.A.
Par Les Trois Coups
Un bout d’usine dans le cœur
Par Laura Plas
Les Trois Coups.com
De l’usine au local syndical en passant par un salon ou un bistrot, Nicolas Bonneau donne à lui seul vie et voix à une galerie de personnages touchants du monde ouvrier dans « Sortie d’usine ». Et on marche avec ce conteur, on réfléchit, mais on sourit aussi.
Il parle, il conte Nicolas Bonneau. Pas essoufflé depuis les neuf ans qu’il tourne Sortie d’usine. À lui seul, il fait l’épopée et le quotidien, les lieux et les gens. Sur scène, il n’y a rien en effet qu’une chaise, un néon qui danse comme une lampe-tempête dans la cabine d’un marin, un cahier d’écolier. Mais on vogue sur les mots. Et face à ce plateau dépouillé, on a plutôt l’impression d’une profusion. Le prologue du spectacle donne le ton dès le début. Nous voici embarqués dans une jacquerie aux côtés de Marx, Rosa Luxemburg, et Jaurès. Nous descendons le fil du temps à la nage, vite, sur un bateau ivre de rêves. Pas le temps de reprendre son souffle ni de s’ennuyer !
Nicolas Bonneau en maître conteur semble ici s’amuser. Il joue sur les apartés et adresses au public, il campe des personnages avec des accents, des mimiques, des postures qui en disent long. Ceux qui lui ont parlé étaient souvent méfiants, avaient peur de se voir trahis sur scène. Au contraire, ils sont ici métamorphosés en personnages souvent hauts en couleur. Le coup de crayon tire le trait avec tendresse, la plume voltige parfois en liberté, semble-t-il. Il y a de la rhapsodie dans ce spectacle : un moment fait écho à un autre, un mot appelle un personnage, un lieu, une nouvelle situation. Le comédien va à sauts et à gambades, mais retombe toujours sur ses pattes car le texte est très, très écrit… peut-être même un peu trop. C’est affaire de goût. Le travail sur la lumière est de même remarquablement ciselé. Il forme comme une écriture parallèle de la pièce. On ne peut que souligner la qualité de la partition élaborée par David Mastretta.
« Ni misérabilisme, ni manichéisme »
La verve et la fantaisie sont en tout cas les alliées de la pudeur. Grâce à elles, Nicolas Bonneau dément cette affirmation que les ouvriers lui ont opposée : « On n’a rien d’intéressant à raconter ». Il parle de fait pour le taiseux, il s’exprime pour la fille d’immigrés malmenée dans les cours de récré. Et il le fait de surcroît avec humour. Le spectacle se clôt sur l’injonction d’un de ses personnages principaux : « N’oublie pas, la rigolade ». Mission accomplie. Ce n’est pas qu’on n’égratigne pas au passage le patron, qu’on oublie les morts, les blessés et les fermetures, mais on en parle en passant, avec l’élégance d’un sourire ou d’une plaisanterie. On ne cache pas la douleur et les humiliations. Cependant, on ne réduit pas comme à la télévision la vie ouvrière à ses malheurs. « Ni misérabilisme, ni manichéisme », affirme en effet le comédien et auteur.
Sortie d’usine n’est donc pas un zoo dévoilant l’espèce menacée des ouvriers, mais l’occasion de venir découvrir Gilbert, Catherine, Philippe et tous les autres. Un spectacle tendre que l’on peut voir en famille. ¶
Laura Plas
Sortie d’usine (Récits du monde ouvrier), de Nicolas Bonneau
Cie La Volige
06 63 25 40 48
Site : www.lavoligenicolasbonneau.fr
Courriel : compagnielavolige@gmail.com
Mise en scène et collaboration à l’écriture : Anne Marcel
Avec : Nicolas Bonneau
Lumières : David Mastretta
Scénographie : Vanessa Jousseaume
Photo : © Arnaud Ledoux
Le Grand Parquet • jardins d’Éole • 35, rue d’Aubervilliers • 75018 Paris
Métro : ligne 12, arrêt Max-Dormoy, ou ligne 7, arrêt Stalingrad
Réservations : 01 40 05 01 50
Site du théâtre : www.legrandparquet.net
Courriel de réservation : billetterie@legrandparquet.net
Du 24 avril au 18 mai 2042, le jeudi, vendredi et samedi à 20 heures, le dimanche à 15 heures (relâche exceptionnelle le samedi 17 mai)
Durée : 1 h 30
15 € | 10 € | 5 € | 3 €
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