Le journal quotidien du spectacle vivant en France. Critiques, annonces, portraits, entretiens, Off et Festival d’Avignon depuis 1991 ! Siège à Avignon, Vaucluse, P.A.C.A.
Par Les Trois Coups
Théâtre populaire à la Fabrik’
Soirée animée, bon enfant et populaire, à la Fabrik’ Théâtre où se déroulait un « Catch impro » dans les règles de l’art, présenté par la compagnie avignonnaise Kamikaz. Spectacle participatif, puisque le public est amené à proposer des thèmes et à voter pour une équipe ou une autre après chaque séquence. Le catch impro, que j’ai découvert ce soir-là, est une variante des matchs impro nés dans les années 1970 au Québec.
« Catch impro » | © D.R.
Loin d’un théâtre élitiste, ce concept, entre théâtre et sport, a ses adeptes, son public, comme l’illustrait la longue file d’attente étirée dans la nuit et le froid. Venus nombreux, les spectateurs ont rapidement rempli les gradins, et la Fabrik’ a fait salle comble : et ça, c’est déjà un plaisir à voir, un théâtre qui vit à Avignon en dehors du festival ! Ce soir-là, à la question du maître de cérémonie « Y a-t-il des personnes qui ne connaissent pas les règles du catch impro ? », seul un petit groupe (dont je faisais partie) lève la main. J’étais donc entourée d’un public averti, rompu à cette discipline, et qui semble prendre plaisir à assister régulièrement à ces jeux d’improvisation.
Sur scène, un décor simple de rigueur. Un ring de catch, deux chaises vides de chaque côté, des bouteilles d’eau par terre. Pour comprendre, rappelons rapidement les règles : deux équipes de deux catcheurs-improvisateurs s’affrontent dans des joutes verbales, sur des sujets qui ne leur sont pas connus à l’avance, donnés pour certains par le public, et avec seulement cinq à vingt secondes de préparation. Le rythme d’un catch impro est endiablé, les mots fusent, l’énergie est décuplée.
David Ritas joue à la perfection le rôle du maître de cérémonie. Amusant, charmeur, un brin désinvolte, il semble être le fils spirituel d’un Antoine de Caunes assagi. Garant de la cohésion du spectacle et lien direct avec le public, il n’est jamais tombé dans le rôle-piège d’un chauffeur de salle, ce qui aurait tout gâché, et dont la salle n’avait visiblement pas besoin. Puis les deux équipes entrent en scène aussi outrancièrement costumées que peuvent l’être de véritables catcheurs. Vincent Dumas et Lucie Veyrier d’un côté, Quentin Surtel et Marion Veyrier de l’autre.
Et les joutes verbales peuvent commencer
Les comédiens qui s’affrontent se connaissent bien, sont très réactifs et complices, et prennent plaisir, c’est visible, à jouer, à se surprendre. Ils ont tous les quatre les qualités indispensables pour ce genre de spectacle : rapidité, esprit affûté, imagination fertile… et une très bonne endurance physique pour tenir le rythme !
On peut supposer, bien sûr, que certains schémas sont travaillés, répétés auparavant, comme le sont les motifs rythmiques dont se servent les musiciens de jazz pour leur improvisation. Tout l’art est d’utiliser à bon escient cette matière première et de savoir broder autour.
Situations cocasses à gogo
Des moments drolatiques, réjouissants, il y en eut beaucoup. Le sujet « Mort tragique dans une armoire avec bougie » joué par Vincent Dumas était délectable. La séquence « couché/debout-assis/à genoux » tout à fait cocasse (tout en continuant à improviser des dialogues sur un thème imposé, les catcheurs ne doivent jamais se trouver ensemble dans une de ces positions). Deux petits exemples parmi les dizaines d’autres thèmes imposés, interprétés par les Kamikaz ce soir-là.
L’ensemble du spectacle est bon, on passe une excellente soirée avec des comédiens agiles et vifs. J’ai apprécié plus particulièrement Quentin Surtel qui a la repartie aisée, le jeu de mots au bout de la langue et la capacité à improviser en vers. Quelques faiblesses parfois, mais rien d’étonnant dans la profusion de cette performance d’environ deux heures. Alors, plutôt dans l’esprit d’améliorer les prestations, on pourrait juste conseiller aux artistes d’éviter la facilité à taper trop souvent en dessous de la ceinture, ou celle de prendre des mimiques outrancières et schématiquement « banlieusardes ». Ça peut être amusant, mais il ne faut pas en abuser.
Un doute aussi : ce public chaleureux, demandeur, se rend-il aussi dans les autres théâtres ? Se déplace-t-il aussi pour d’autres formes de spectacle ? N’assimile-t-il pas les impros à du reality show ?
Si l’expérience vous tente, la compagnie des Kamikaz (Kompagnie avignonnaise des modestes improvisateurs ki aiment zouer, s’il vous plaît), qui compte une quinzaine de comédiens, propose un spectacle par mois jusqu’en juin prochain (voir le site de la Fabrik’ Théâtre pour les dates), sous forme de match ou de catch. Et, vu le succès, il est conseillé de réserver. ¶
Martine Rieffel
Les Trois Coups
Catch impro
Compagnie des Kamikaz • 84000 Avignon
Courriel : kamikaz.avignon@gmail.com
Entraîneur : Patrice Rocour
06 80 90 96 06
Avec ce soir-là : Vincent Dumas, David Ritas, Quentin Surtel, Marion Veyrier, Lucie Veyrier
Fabrik’ Théâtre • 10, route de Lyon • impasse Favot • 84000 Avignon
Site du théâtre : www.fabriktheatre.fr
Réservations : 04 90 86 47 81
courriel : contact@fabriktheatre.fr
Le 15 décembre 2011 à 20 h 30
10 € | 8 €
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