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Le journal quotidien du spectacle vivant en France. Critiques, annonces, portraits, entretiens, Off et Festival d’Avignon depuis 1991 ! Siège à Avignon, Vaucluse, P.A.C.A.

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« Écrits pour la parole », de Léonora Miano, a paru chez L’Arche éditeur

« Écrits pour la parole »

de Léonora Miano

 

Couleur

J’étais tombé sur l’un des secrets les mieux gardés des Noirs :

la plupart d’entre nous n’étaient pas intéressés par la révolte ;

la plupart d’entre nous étaient fatigués de penser tout le temps

au problème racial…

Barack Obama, les Rêves de mon père

 

ecrits-pour-la-parole-300Petite fille, tu te voyais blanche dans tes rêves, tu savais

que c’était toi, la seule chose, c’est que tu étais blanche, il y

avait une balançoire dans le jardin, de l’herbe verte autour,

des pâquerettes comme des sourires au milieu des touffes

d’herbe, tu étais heureuse là, tournant le dos à la maison,

une petite bâtisse en bois jamais habitée dans la réalité,

seulement dans tes rêves, elle était bleue, pas vraiment, tu

dirais indigo, ce qui semble curieux pour les murs d’une

maison, mais c’était ainsi, un rosier grimpant à fleurs rouges

courait le long de la façade, à droite de la porte d’entrée

peinte dans les mêmes tons que les murs, si bien qu’on ne

la distinguait pas, tu crois qu’il n’y avait pas de fenêtres.

Paupières plissées pour protéger la claire pupille de tes

yeux tournés vers le soleil, tu te balançais toute la journée

jusqu’au crépuscule, tu ne t’es jamais vue faisant quoi que

ce soit d’autre ni côtoyant quiconque, il y avait des gens

dans la maison mais tu ne les voyais pas, ne recherchais pas

leur compagnie ni eux la tienne, il n’y avait pas une fourmi,

pas un ver de terre, aucune de ces bestioles que remarquent

les enfants, aucune compagnie d’amis imaginaires, tu étais

seule sur ta balançoire, seule et blanche, seule mais blanche,

cela te convenait, tu en avais même besoin, de la solitude

comme de la blancheur, le rêve prenait fin au coucher du

soleil, la fillette aux yeux clairs poussait la porte indigo, pénétrait

dans l’habitation, tu ne la voyais jamais faire, c’était

là que sonnait le réveil, l’heure de vivre dans le vrai.

 

Recueilli par

Les Trois Coups

www.lestroiscoups.com


L’Arche éditeur • 86, rue Bonaparte • 75006 Paris

Téléphone : 01 46 33 49 59

Télécopie : 01 46 33 56 40

http://www.arche-editeur.com

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