Le journal quotidien du spectacle vivant en France. Critiques, annonces, portraits, entretiens, Off et Festival d’Avignon depuis 1991 ! Siège à Avignon, Vaucluse, P.A.C.A.
Par Les Trois Coups
Danser pour transmettre l’amour de la peinture
Par Trina Mounier
Les Trois Coups.com
Les liens étroits qu’entretiennent la danse et l’art contemporain dans leur manière de penser l’espace, de concevoir l’acte artistique, dans leur esthétique même, sont bien connus et facilement repérables. Il est plus rare qu’un danseur choisisse de rendre hommage à un peintre et d’écrire une chorégraphie pour mieux le faire appréhender du jeune public. Faisant ainsi coup double. De création et de transmission, sur la peinture et sur la danse…
« Henriette et Matisse » | © Manon Milley
Il est vrai qu’Henri Matisse n’est pas n’importe quel peintre. En outre, il était à ce point féru de danse qu’il lui consacra maints tableaux parmi les plus beaux du xxe siècle. Et derrière Matisse se profile tout créateur face à l’acte de création… En apparence, il est question ici des relations entre Matisse et son modèle, une certaine Henriette. À lire à voix haute le titre de ce spectacle, on entend nettement : Henriette est Matisse, voire Henri est Matisse… Des relations avec son contraire et son double…
Sur la scène, quatre danseurs. Davy Brun danse pour Matisse, dont il évoque les états d’âme, les inquiétudes devant sa page blanche à lui, faite de milliers de feuilles réunies en un serpent, un accordéon, une créature peu à peu envahissante, mais sans laquelle l’œuvre resterait désincarnée, virtuelle, lettre morte, à la fois décor, accessoire et partenaire. Caroline Blanc incarne à la perfection cette grâce et cette élégance originelles indissociables de l’idée même de danseuse. Elle le poursuit, lui échappe, se cache, se moque, disparaît, le subjugue. Tandis que Lila Abdelmoumène et Tristan Robilliard ajoutent une note ludique : tels des enfants, ils ajoutent la couleur, figurent les pinceaux, sèment le désordre, introduisent entre le créateur et lui-même un petit grain de folie…
Il faut aussi parler de la bande-son qui se promène de-ci de-là. Elle varie les inspirations et les rythmes jusqu’à l’inévitable Clair de lune de Debussy, qui salue l’arrivée comme une apothéose du fameux Nu bleu, créature de son Pygmalion, merveille vivante qui ne demande plus qu’à être encadrée, figée au milieu de toutes ces feuilles blanches enfin rendues à leur destination première…
Promesses de la toile blanche
Cette chorégraphie, très joyeuse, très vivante, remplit à merveille son objectif avoué : faire aimer et comprendre l’art sous deux de ses formes les plus antagonistes possibles : spectacle vivant et tableau, mouvement de la vie et forme arrêtée… en apparence ! Car ce qu’essayait de capter Matisse (et avec quelle réussite !), c’est précisément le mouvement, l’occupation de l’espace. Et ce que nous présente Michel Kelemenis, c’est l’atelier du peintre, le processus de création à l’œuvre. La qualité d’attention des enfants, très nombreux dans la salle, est impressionnante, mais le plaisir est aussi du côté des adultes ! ¶
Trina Mounier
Henriette et Matisse, de Michel Kelemenis
Conception générale et chorégraphie : Michel Kelemenis
Danseurs : Lila Abdelmoumène, Davy Brun, Tristan Robilliard, Cécile Robin-Prévallée
Conception sonore : Olivier Clargé
Scénographie : Bruno de Lavenère
Costumes : Philippe Combeau
Lumières : Nicolas Fernandez
Le Toboggan • 14, avenue Jean-Macé • 69152 Décines cedex
Réservations : 04 72 93 30 00
Programmation Maison de la danse • 8, avenue Jean-Mermoz • 69008 Lyon
04 72 78 18 18
Du 24 au 28 janvier 2012 à 20 h 30
Durée : 43 min
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