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Vous avez dit « populaire » ?
Par Jean-François Picaut
Les Trois Coups.com
Le 4 juin prochain, l’agglomération de Rennes, la Bretagne et même la France entière vivront au rythme de « la Traviata » jouée sur la scène de l’Opéra rennais. Cet exceptionnel évènement culturel et populaire sera rendu possible grâce à la collaboration de tous les acteurs des nouvelles technologies dans la métropole bretonne.
Alain Surrans | © Jean-François Picaut
Deux ans après l’Enlèvement au sérail, et quatre ans après un Don Giovanni dans toutes les mémoires, l’équipe d’Alain Surrans fait confiance à Verdi et à son œuvre universelle pour rassembler tous les partenaires d’une nouvelle aventure collective, technologique, artistique et populaire. Le directeur de l’Opéra est ainsi fidèle à son credo selon lequel l’opéra a vocation à retrouver ses origines populaires et à illustrer ses liens constants avec toutes les technologies de pointe. La diffusion de la Traviata va donc se transformer en une grande fête de l’opéra, à partager par tous les publics, dans l’espace public comme dans l’intimité familiale. Une nouvelle fois, les technologies les plus avancées dans le domaine de l’image, du son et du numérique ont été mobilisées pour réaliser cet exploit.
Simultanément à son interprétation sur la scène de l’Opéra, la Traviata sera diffusée sur grand écran, place de la Mairie à Rennes et dans de grands espaces en plein air à Betton, Bruz, Cesson-Sévigné, Dinard et Saint-Malo (Ille-et-Vilaine) mais aussi à Lorient (Morbihan). Elle sera retransmise le 5 juin à l’Opéra de Jersey. Grâce à la coopération très rare entre des télévisions locales et des chaînes nationales, l’opéra de Verdi sera également diffusé en direct à la télévision sur T.V.R. (Ille-et-Vilaine), Tébéo (Finistère), Tytélé (Morbihan)et Armor T.V. (Côtes-d’Armor). France 3 assurera cette diffusion en différé. On pourra également écouter la Traviata en direct sur France Musique.
Les toutes dernières avancées technologiques
Au-delà des retransmissions en direct, des captations seront réalisées qui feront appel aux toutes dernières avancées technologiques avec l’alliance de l’image et du son en très haute définition. Ce projet, qui a reçu le label Novosphère, est soutenu par le Pôle images et réseaux. Il associe des villes, Rennes-Métropole, le conseil général d’Ille-et-Vilaine, le conseil régional de Bretagne, le ministère de la Culture, des établissements d’enseignement et de recherche (université Rennes-II, Institut national des sciences appliquées, I.N.S.A. de Rennes) et des entreprises du secteur des nouvelles technologies (Artefacto, Diwel, France Télévisions innovations, Orange, Technicolor, etc.). Parmi les prouesses techniques réalisées, citons la captation et le rendu en ultrahaute définition, la captation à 360° de même que la captation en son spatialisé 360° et ultrahaute définition. Cette dernière prouesse faisant appel au son binaural (tel que le perçoivent nos deux oreilles) et à la technologie 5.1, réalisée sous la responsabilité de Mme Aurélie Beaumont, chef de projet. On pourra profiter de cet enregistrement exceptionnel du 4 juin au 4 juillet sur NouvOson, le site des innovations technologiques en matière sonore de Radio France. On le retrouvera également de la mi-juin au 17 septembre sur la nouvelle offre numérique de France Télévisions qui sera révélée à cette occasion. Enfin, la société Artefacto, sous la houlette de M. Erwan Mahé, présentera ses toutes dernières recherches en matière de réalité augmentée et de réalité virtuelle. Rendez-vous est donné aux curieux, à l’hôtel de ville (Rennes) le 4 juin de 12 heures à 18 h 30.
Un évènement artistique et populaire
Pour importantes que soient ces avancées technologiques, elles ne doivent pas masquer l’essentiel, la Traviata elle-même. Il ne faut pas oublier que c’est une œuvre qui « met en scène l’un de ces flamboyants personnages féminins au destin tragique, dont les interprètes doivent être à la fois des virtuoses du chant et de grandes tragédiennes […] un de ces rôles-titres qui font rêver les artistes autant que le public », comme le dit Alain Surrans. Dans le rôle de Violetta, les spectateurs pourront admirer la soprano d’origine kazakhe Maïa Kerey. Elle sera notamment entourée de Leonardo Caimi (ténor, Alfredo Germont) et de Mario Giossi (baryton, Giorgio Germont). Ceux qui craindraient que toute cette technique n’étouffe l’œuvre devraient être rassurés par ces mots du chef Antony Hermus, qui dirigera l’œuvre : « Les nouvelles technologies permettent au contraire une pénétration plus intime de la musique et de l’action sur scène ». Selon lui, l’intimité du théâtre à l’italienne qu’est l’Opéra de Rennes est tout simplement « étendue » par ces technologies. Avec le metteur en scène, Jean-Romain Vesperini, ils en ont conclu à la nécessité de travailler « comme au cinéma ».
Nous avons vu que l’étendue de la diffusion suffirait à faire de cette Traviata un évènement populaire exceptionnel. L’Opéra de Rennes ne s’en est pas tenu là pourtant. De nombreuses actions de médiation culturelle ont été organisées autour de cette œuvre de Verdi. Elles se sont adressées à des collégiens, au centre pénitentiaire des femmes, aux usagers d’un centre social, à des personnes handicapées. Le cœur de ce travail ou son point culminant si l’on préfère est certainement l’opération baptisée « Tous ensemble ». Il s’agit de proposer à tous les spectateurs de la Traviata de chanter ensemble à l’entracte le Brindisi ou Libiamo, un des airs les plus célèbres de l’ouvrage, sous la direction du chef Antony Hermus lui-même. Pour cela, des ateliers d’initiation au chœur sont organisés dans différentes villes, et chacun peut s’entraîner chez soi en téléchargeant, sur le site de l’Opéra, une séance de travail et la partition !
Réjouissons-nous donc de cette nouvelle initiative qui, combattant des préjugés trop répandus, rapprochera encore plus l’opéra de ses origines populaires. Ainsi, cet art du merveilleux, du fantastique, de l’illusion, spectacle total au service de belles histoires et de fortes émotions individuelles ou collectives, retrouvera-t-il, on l’espère, un succès qui n’aurait jamais dû se démentir. Et, en tout cas, il fera mentir ceux qui persistent à affirmer que l’art lyrique est un privilège de nature ou de classe. ¶
Jean-François Picaut
La Traviata sur scène et sur écrans
Opéra en trois actes
Livret : Francesco Maria Piave (1853)
Musique : Giuseppe Verdi
Direction musicale : Antony Hermus, assisté d’Arnaud Oosterbaan
Mise en scène : Jean-Romain Vesperini, assisté de Frédérique Lombard
Avec : Maïra Kerey, Sophie Pondjiclis, Sophie Angebault, Leonardo Caimi, Marzio Giossi, Marlon Soufflet, Jean-Vincent Blot, Thomas Roullon, Bernard Deletré
Opéra de Rennes • place de l’Hôtel-de-Ville • B.P. 3126 • 35031 Rennes cedex
Téléphone : 02 23 62 28 28
Les 27, 29 et 31 mai 2013 à 20 heures
ainsi que le 2 juin 2013 à 16 heures
et le 4 juin 2013 à 20 heures (sur scène et sur écrans)
Durée : 2 h 40
45 € à 12 €