Le journal quotidien du spectacle vivant en France. Critiques, annonces, portraits, entretiens, Off et Festival d’Avignon depuis 1991 ! Siège à Avignon, Vaucluse, P.A.C.A.
Par Les Trois Coups
Un « corps à corps » abstrait et lyrique
Écrites dans les années 1980, les deux chorégraphies de Mathilde Monnier et Jean-François Duroure sont remises au goût du jour par la sensible interprétation de Sonia Darbois et Jonathan Pranlas. Accompagnés par des musiques de Kurt Weil et de Bernard Herrmann, les danseurs déploient leur plus belle énergie pour nous transporter dans l’univers de ces grands moments de la « jeune danse française ».
« Pudique acide / Extasis » | © Marc Coudrais
Les deux danseurs, un homme, une femme, portent les mêmes vêtements : fuseau noir, kilt, T-shirt blanc, et T-shirt noir par-dessus pour la première pièce, imperméables beiges et tutus froufroutants, puis vestes de costard et slip couleur chair pour la deuxième. Ils ne sont pour autant pas des clones, ni des androgynes, mais plutôt cet absolu qu’évoque la figure de l’ange. Ils sont les deux facettes de cette même figure de perfection.
La danse s’articule entre moments musicaux et moments de silence. Toujours au diapason l’un de l’autre et dans une parfaite coordination, les danseurs exécutent des mouvements à la fois familiers et surprenants, cumulant les références et les clins d’œil aux grands de l’histoire de la danse ; Pina Bausch et Merce Cunningham ne sont pas bien loin. Tantôt dans la symétrie, la mimétique, tantôt dans l’opposition, la confrontation, parfois en légèreté, en virevoltes, parfois en chocs, coups, chutes, les danseurs se rencontrent et se découvrent, se fondant parfois en une seule entité, qui se développe puis se scinde pour nous redonner à voir deux individus distincts, qui cette fois se déchirent, se repoussent, se rejettent. Pour mieux se retrouver ensuite.
Émotion, poésie, beauté
Est-il question ici du rapport à l’autre, à soi, de la difficulté d’établir une identité pour soi, pour l’autre ? Faut-il voir ces danseurs comme les symboles de la dualité du monde, de l’intranquillité et du mouvement ? Pudique acide, avec ses chants allemands ainsi que certains mouvements réguliers et saccadés, oriente le propos vers un registre historique, utilise des codes de l’imaginaire collectif pour nous parler des années de la guerre. Extasis se démarque de cette piste d’interprétation en posant son décor comme un tournage de cinéma. Les impers façon West Side Story, les projecteurs à vue sur la scène et les jeux sur les ombres des danseurs transportent notre regard dans un imaginaire plus romanesque, où l’on imagine une histoire d’amour. Mais, comme nous le révèlent Mathilde Monnier et Jean-François Duroure, il s’agit avant tout d’un travail sur la forme, d’une volonté de créer un spectacle « chargé d’émotion, de poésie, et de beauté, notions humaines dont nous avons aujourd’hui plus que jamais besoin ».
Les deux pièces sont donc manifestement des variations autour de ce thème central qu’est le « corps à corps ». Dans Pudique acide, la danse est plus axée sur le rythme, et la confrontation et la rivalité sont traités d’une façon purement formelle, quasi abstraite. Dans Extasis, la narration entre en jeu, la danse y est plus théâtrale, plus lyrique, aussi.
Sonia Darbois et Jonathan Pranlas font exister ici et maintenant ces chorégraphies d’il y a vingt-cinq ans qui n’ont pas pris une ride et qui savent toujours aussi bien nous surprendre, nous amuser, nous captiver. Nous emmener ailleurs, dans un voyage tout en sensations et en émotions. Ils s’approprient la chorégraphie jusqu’à en faire leur propre histoire. Et, dans une sincérité extrême et une authenticité émouvante, ils acceptent de tout donner, de se mettre à nu pour nous faire (re)vivre ces grands moments de la danse des années 1980. ¶
Margot Boisier
Les Trois Coups
Pudique acide / Extasis, de Mathilde Monnier et Jean-François Duroure
Chorégraphie : Mathilde Monnier et Jean-François Duroure
Danse : Sonia Darbois, Jonathan Pranlas
Musique : Kurt Weil, Bernard Herrmann
Lumière : Éric Wurtz
Réalisation costumes : Laurence Alquier
Direction technique : Thierry Cabrera
Régie générale : Marc Coudrais
Régie plateau : Jean-Christophe Minnart
Direction de production : Jean-Marc Urrea, Anne Fontanesi, Anne Bautz
Pudique acide a été créé en mars 1984 à New York, et Extasis en novembre 1985 à la Maison de la danse de Lyon. Recréation le 20 juin 2011 au festival Montpellier danse 2011 en Languedoc-Rousillon
Pôle Sud • 1, rue de Bourgogne • 67100 Strasbourg
Site du théâtre : www.pole-sud.fr
Courriel de réservation : infos@pole-sud.fr
Réservations : 03 88 39 23 40
Les 22, 23 et 24 novembre 2011 à 20 h 30
Durée : 65 minutes environ (dont 15 minutes d’entracte)
20 € | 16 € | 8 € | 5,50 €
Tournée :
– 29 novembre 2011, Scène des Vosges, Épinal
– 1 décembre 2011, Scène nationale de Mâcon
– 2 décembre 2011, Théâtre de la Passerelle, Gap
– 9 décembre 2011, Théâtre de la Tuilerie, Bédarieux
– 17 février 2012, Scène nationale du pays de Montbéliard
– 9 mars 2012, Centre Pompidou, Metz
– 22 mars 2012, L’Avant-scène, Cognac
– 31 mars 2012, scènes croisées de Lozère, Mende
– du 8 au 12 mai 2012, Théâtre Garonne, Toulouse
– 24 mai 2012, Le Vivat, Armentières
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