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Par Les Trois Coups
On aurait bien voulu y entrer
Par Aline Bartoli
Les Trois Coups.com
Écrit, joué et mis en scène par Brigitte Lo Cicero, « Une chambre à Hollywood » explore les méandres de l’âme dans un Hollywood des années 1950, stéréotype même du rêve américain. Un programme trop ambitieux ? Les bonnes intentions et le rassemblement d’ingrédients propices à la mise en place d’une pièce réussie ne suffisent pas. Ça manque encore de maturité.
« Une chambre à Hollywood » | de et avec Brigitte Lo Cicero
Sur les conseils de Simon, un séduisant avocat dont elle tombe amoureuse, Nelly va prendre des cours de théâtre. De petite standardiste balayée du regard par son patron, elle va devenir en quelques années actrice de renom à Hollywood. Malgré le temps et son changement de statut, elle reste toujours très éprise de Simon, que l’on ne voit jamais. Un jour, surgit son frère Harry qu’elle n’a pas revu depuis des années, une brute épaisse qui réveille un passé douloureux. Au fil de la pièce, on sent que Nelly perd pied, déraille, jusqu’à la chute surprenante qui fera penser que tout çà n’était qu’un rêve… ou pas ?
Le décor de la chambre, la musique et la mise en scène sont cohérents et nous plongent sans difficulté dans l’univers hollywoodien des années 1950. Brigitte Lo Cicero est éclatante de glamour dans ses magnifiques tenues de starlette. Mais ces moments de grâce sont malheureusement de courte durée.
L’écriture est tout d’abord trop explicative et manque de rythme. Même les comédiens mettent du temps à se donner la réplique. C’est un peu comme si on assistait au tournage de scènes de films, or le théâtre ne peut pas souffrir les mêmes longueurs, ou alors les silences doivent se justifier, ce qui n’est pas le cas ici. Le vrai problème est que le suspense n’est pas réellement cultivé alors que cela devrait en être tout le propos. Bien sûr, on sent qu’il y a un truc qui cloche dans l’attitude de Nelly par cette voix bizarre dont elle est habitée par moments (très surprenante la première fois). Mais l’intrigue n’est pas suffisamment bien ficelée pour tenir réellement en haleine.
Manque de parti pris
Par ailleurs, la difficulté est que l’univers de la pièce se situe entre celui de Tennessee Williams et celui lynchien d’un Mulholland Drive, en combinant de surcroît comédie et drame hollywoodien. Le manque de parti pris donne au final un résultat mi-figue mi-raisin : les moments censés être drôles ne le sont que vaguement, voire un peu ridicules. Quant au drame, il ne se comprend que sur la dernière minute.
Si Brigitte Lo Cicero s’en sort plutôt bien en actrice glamour, physique aidant, on ne peut pas en dire autant des autres comédiens dont le jeu manque de maîtrise et surtout de justesse, et ne parvient pas à convaincre. Bruce Tessore n’est absolument pas dans son assiette lorsqu’il joue Simon, le brillant avocat, même s’il se rattrape un peu dans la peau de Harry, la crapule sans scrupules. C’est bien dommage, car il s’agit de la première scène, et elle coupe le spectateur dans son élan alors qu’il aspire à se glisser dans l’histoire. Lea (Sidney Laurent) verse dans la caricature de la fille de concierge sans avenir et manque beaucoup d’occasions de nous émouvoir réellement. Exception faite pour Sezny (Francis Lacotte), peut-être le seul comédien qui réussit à rester naturel avec une touche d’extravagance suffisante pour crédibiliser son personnage d’agent artistique.
Ce qui est rageant est que l’histoire en elle-même est pleine de potentiel. La névrose, sous toutes ses formes, intrigue nos consciences, d’autant plus lorsqu’elle provient d’une blessure familiale inavouable et qu’elle s’allie à un désir de plaire et d’être aimé poussé à l’extrême. Au point d’être obsédé par la célébrité (un sujet très actuel). On aurait alors voulu pouvoir pénétrer dans cette chambre psychotique, être pris dans une tourmente psychologique, être terrassé par un suspense insoutenable jusqu’à la délivrance finale, au lieu de rester platement sur le pas de la porte. ¶
Aline Bartoli
Une chambre à Hollywood, de Brigitte Lo Cicero
Compagnie Acteur toi-même • 10, cité Beauharnais • 75011 Paris
06 21 03 02 72
Mise en scène : Brigitte Lo Cicero
Assistante à la mise en scène : Sidney Laurent
Avec : Francis Lacotte, Sidney Laurent, Brigitte Lo Cicero, Bruce Tessore
Compositeur : Franck Coméré
Créateur lumières : Valerio Villalba
Chorégraphe : IUNA
Théâtre Côté cour • 12, rue Édouard-Lockroy • 75011 Paris
Site du théâtre : www.theatrecotecour.com
Courriel de réservation : theatrecotecour@free.fr
Réservations : 01 47 00 43 55
Du 1er octobre au 18 décembre 2011, le samedi à 21 heures et le dimanche à 18 heures
15 € | 10 €
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