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Le journal quotidien du spectacle vivant en France. Critiques, annonces, portraits, entretiens, Off et Festival d’Avignon depuis 1991 ! Siège à Avignon, Vaucluse, P.A.C.A.

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« Zakouski ou la Vie joyeuse », d’après des récits de Mikhaïl Zochtchenko (critique), Théâtre de l’Opprimé à Paris

Zakouski : spécialité russe bien accommodée, à ne pas servir trop frais !


Par Laura Plas

Les Trois Coups.com


La saison du Théâtre de l’Opprimé se poursuit avec « Zakouski ou la Vie joyeuse », spectacle du Théâtre Yunqué. Burlesque, satire et moments de tendresse sont au rendez-vous dans ce spectacle qui nous fait découvrir l’œuvre de Mikhaïl Zochtchenko. Il faut du temps pour pénétrer dans cette Russie stylisée et accepter les codes de jeu, mais l’intelligence de l’adaptation et de la dramaturgie finit par s’imposer.

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« Zakouski ou la vie joyeuse  » | © D.R.

Après Schwartz et Erdman, voici un nouvel enfant de Gogol : un fils obscur qu’Éric Prigent a eu la belle idée de tirer de l’ombre de l’oubli : Mikhaïl Zochtchenko. Zakouski ou la Vie joyeuse présente donc d’abord cet intérêt de faire découvrir la saveur d’une langue et d’un imaginaire inconnus. Or, c’est une saveur douce-amère : les scènes burlesques se retirent parfois à petit pas pour que l’on parle d’amour, mais la bluette vire au règlement de compte conjugal. En définitive, on rit quand on pourrait pleurer.

Cet humour mélancolique et rageur, Mikhaïl Zochtchenko n’est bien sûr pas le seul à l’avoir reçu en héritage de Gogol. En tout cas, au moins dans les passages choisis et sélectionnés par Éric Prigent, il nous révèle une Russie peu connue, celle qui se met en place juste après la révolution alors que les Rouges luttent encore avec les Blancs. Et ce qu’il y a de terrible, c’est qu’à cette époque déjà, la peur, la délation et la répression sont le lot quotidien. Plus que sociale, cette satire est donc politique, et elle est bien plus explicite que celle que développeront Schwab ou Erdman. Intéressante particularité qui vaut le détour.

La belle métamorphose des contes

Mais si l’univers de Mikhaïl Zochtchenko nous est révélé, c’est grâce à une remarquable adaptation. Grâce au travail d’Éric Prigent, les contes et nouvelles se métamorphosent en effet en saynètes. Et non seulement on a alors l’impression que les textes ont été écrits pour la scène (à l’instar des sketches d’un Karl Valentin auquel on pense souvent), mais peu à peu se crée une belle cohérence. En effet, des personnages reviennent, des phrases paraissent faire écho à d’autres, des répétitions colorent d’un autre sens des répliques. Encore faut-il bien une demi-heure pour en prendre toute la mesure et se sentir embarqué.

Ce travail d’adaptation est lui même indissociable de celui sur le son et la lumière. C’est patent dans la liaison entre les scènes. Commençons par le son. Si on est vraiment sceptique en ce qui concerne l’emploi des voix off, très artificiel, le choix des musiques est excellent. On a l’impression parfois qu’un morceau nous parvient d’outre-tombe, ou que des lambeaux de temps se sont accrochés aux notes. La lumière quant à elle aménage des clairs-obscurs, des échappées lumineuses ou des obscurités menaçantes. Elle n’est jamais naturelle, ce qui fait que l’on a toujours l’impression que la scène présente une mise en abyme : un exemple de théâtre dans le théâtre.

Prendre le temps d’un bain

La mise en scène va d’ailleurs dans ce sens ainsi que le jeu. Serge Poncelet a choisi de faire coexister sur scène des comédiens masqués et à visage nu. Il exhibe ainsi la théâtralité de son spectacle. D’ailleurs, la scénographie met en son centre un castelet aux rideaux rouges, et la pièce commence et s’achève dans un théâtre. Franchement, on n’est pas convaincu par le jeu de chacun, et on a préféré ces moments où les personnages se défaisaient de leurs postiches. L’humanité est assez grimaçante, le burlesque ici du moins n’avait pas besoin de ces accessoires, mais on comprend le choix. Autre bémol sur la mise en scène. On regrette que certaines situations ne soient pas davantage exploitées. Quand les comédiens ont le temps de vivre les situations, il se passe des choses incroyables. On se souviendra en particulier d’une très belle scène de bain.

Le spectacle fourmille d’idées ingénieuses et de charmantes révélations. Il faut simplement aimer les saveurs burlesques et surtout laisser le temps à la mise en scène et à l’adaptation de révéler le bouquet de ce joli cru. 

Laura Plas


Zakouski ou la Vie joyeuse, d’après des récits de Mikhaïl Zochtchenko

Théâtre Yunké • 35, avenue-Faidherbe • 93100 Montreuil

06 77 78 07 53

Courriel de la compagnie : theatreyunque@wanadoo.fr

Site de la compagnie : www.yunque.fr

Adaptation : Éric Prigent

Mise en scène : Serge Poncelet

Assistante à la mise en scène : Nadine Landucci

Avec : Stephane Alberici, Marie Duverger, Éric Prigent, Nadia Sokolow

Scénographie : Stéphane Alberici, Nadine Landucci, Serge Poncelet

Costumes : Barbara Gassier

Masques : Stéphane Alberici

Création lumières : François Martineau

Univers sonores : Ulrich Mathon

Théâtre de l’Opprimé • 78-80, rue du Charolais • 75012 Paris

Accès : métro Reuilly-Diderot (sortie rue de Chaligny), métro Montgallet, métro Dugommier

Site du théâtre : www.theatredelopprime.com

Réservations : 01 43 40 44 44

Du mercredi 8 février au dimanche 4 mars 2012, du mercredi au samedi à 20 h 30 et le dimanche à 17 heures

Durée : 1 h 20

16 € | 12 € | 10 €

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F
Ça a du être très amusant à regarder!
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