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Le journal quotidien du spectacle vivant en France. Critiques, annonces, portraits, entretiens, Off et Festival d’Avignon depuis 1991 ! Siège à Avignon, Vaucluse, P.A.C.A.

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« Toto le Mômo », de David Ayala d’après Antonin Artaud (critique), Théâtre des Abbesses à Paris

Artaud a quelque chose à dire


Par Hélène Merlin

Les Trois Coups.com


Libéré en 1946, après avoir subi une cinquantaine d’électrochocs pendant neuf ans d’internement en hôpitaux psychiatriques, Antonin Artaud rejoint Paris et prépare cette fameuse conférence du 13 janvier 1947, qu’il donne au Théâtre du Vieux-Colombier. « Toto le Mômo » est la genèse de ce dernier témoignage que cet homme, auteur et théoricien du théâtre, comédien et artiste, ait offert au monde.

toto-le-momo-fw.jpgAntonin Artaud, alias Toto le Mômo… Un surnom en guise de titre, qui nous annonce déjà une plongée dans l’intimité de ce génie, dans sa détresse et sa fragilité presque enfantine, dans sa solitude et sa révolte. Consumé par l’angoisse, la douleur, et porté par cette volonté furieuse de dire encore, de lutter encore, une dernière fois, Artaud semble vouloir échapper à la mort, qui s’est blottie tout contre lui. « Je souffre parce que je suis vivant » : cet homme enfermé dans sa condition humaine, en proie à un monde qui « va mal », et qui a « deux ou trois dents contre la société », essaye de repousser les murs de sa folie et parvient, encore, à atteindre des états de conscience et de lucidité absolue… Avant que ses idées lui échappent, avant de perdre le contrôle, avant que l’obscurité se fasse inexorablement…

Pour donner naissance à ce projet qu’il a imaginé et qu’il interprète agilement, David Ayala a fait appel à deux metteurs en scène, pour nous offrir une œuvre unique. Jacques Bioulès nous offre une scénographie en clair-obscur, à l’image de la pensée d’Artaud à la fin de sa vie. En créant un univers à la fois épuré et totalement chaotique, éclairé tantôt par une lumière rasante et diffuse, tantôt focalisée par d’imposants abat-jour suspendus au plafond, il nous fait voyager sans cesse entre la conscience et l’inconscience.

Quant à Lionel Parlier, afin que les mots nous percutent, afin d’en révéler leur essence, il a réussi à faire naître le texte dans le corps du comédien David Ayala. En tension permanente, à cheval sur un équilibre instable, évoluant dans un décor de chaises hautes en fer forgé, autant improbables qu’inconfortables, David Ayala semble monter et redescendre les échelons de la conscience pour nous laisser entendre un texte définitivement dense. On ne saurait y voir là qu’un hommage habile à Antonin Artaud, qui disait qu’en cherchant dans la chair de son corps, il y a vu les racines de son âme…

Cette pièce nous impose un effort d’attention et d’ouverture. Elle visite les tréfonds de notre inconscience : elle nous échappe et nous saisit de plein fouet, comme la vie, de manière cyclique. David Ayala nous sollicite sans violence, et nous violente sans brutalité. Il nous bouleverse et nous fait rire. Car il nous invite avec force et pudeur à nous perdre dans les méandres de la pensée d’Artaud, fascinante et subversive, qu’il griffonne à l’aide d’une craie blanche, sur le sol noir…

Cette pièce est un extrait de vie, un brouillon de pensée, un miroir dans lequel on se re-connaît… 

Hélène Merlin


Toto le Mômo, de David Ayala, d’après Antonin Artaud

Créé en 1997 à Cergy-Pontoise et présenté en 2005 au Théâtre Paris-Villette

Imaginé et interprété par David Ayala

Mise en scène : Jacques Bouliès et Lionel Parlier

Scénographie : Jacques Bouliès

Costumes : Gabrielle Mutel

Création lumière : Serge Oddos

Régie : Christophe Kehrli

Théâtre des Abbesses • 31, rue des Abbesses • Paris

Réservations : 01 42 74 22 77

Du 27 novembre au 1er décembre 2007 à 20 h 30

Durée : 1 h 50

13 € | 10,50 € 

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