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Le journal quotidien du spectacle vivant en France. Critiques, annonces, portraits, entretiens, Off et Festival d’Avignon depuis 1991 ! Siège à Avignon, Vaucluse, P.A.C.A.

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« La Contrebasse », de Patrick Süskind (critique), Théâtre de Poche-Montparnasse à Paris

Petite pièce pour contrebasse


Par Cédric Enjalbert

Les Trois Coups.com


Le plus gros des instruments de l’orchestre dans l’un des plus petits théâtres de Paris ! Voilà qui aurait pu faire un gros titre si l’évènement avait été au moins aussi spectaculaire que l’annonce. Or l’air joué par cette « Contrebasse », de Patrick Süskind, au (charmant) Théâtre de Poche-Montparnasse est plutôt mezzo-mezzo…

Décor sobre, lumière tamisée et parois (faussement) insonorisées. Un frigo pour les bières, quelques pupitres pour les partitions. Et une contrebasse lascivement accoudée à son support, laissant paraître ses formes galbées sous un voile dont ne dépassent que son manche, ses chevilles et ses volutes. Image paradoxale de l’« érotique-voilée ». Et paradoxal, cet instrument l’est, assurément. Aussi indispensable que méprisé, aussi difficile à maîtriser qu’ingrat à pratiquer, on le cache, lui, énorme, au fin fond de la fosse. Et, avec lui, le contrebassiste. Il essaiera bien de vous convaincre – attendant d’enfiler son uniforme de pingouin-fonctionnaire-de-l’Orchestre-national pour s’en aller jouer l’Or du Rhin – que, mal-aimée, sa dame à quatre cordes est cependant la plus belle et la plus indispensable de l’orchestre. Mais, en vain. De toute façon, il n’y croit pas vraiment. Et puis ce n’est pas le sujet d’ailleurs.

En près d’une heure et demie monologuée, notre triste artiste, contrebassiste par défaut (une histoire psychanalytique qu’il se fera un plaisir de vous expliquer) parlera, en effet, musique, mais aussi (entre deux bières) philosophie (existentielle) et amour (passionnel). Amour frustré car il aime la soprano, mais n’a positivement aucune chance, lui, embarrassé par sa compagne balourde, de lui déclarer jamais son amour.

Alternant les sujets sur un ton se voulant primesautier, pratiquant l’aphorisme et la dérision, se fendant même de quelques effets de comique (un peu gros), le texte ne s’affranchit pourtant pas d’une pesanteur toute didactique. Que Patrick Süskind soit allé chercher un peu de son inspiration dans un des tomes (lourds et nombreux, nécessairement) de l’Histoire universelle de la musique classique n’aurait rien d’étonnant. Question théâtralité, on fait mieux. On ne s’étonnera donc pas, non plus, du jeu inégal voire franchement caricatural de Stéphane Bierry, desservi par ce texte difficile. Et l’on retiendra l’énergie d’un comédien qui se démène (trop peut-être, ses va-et-vient et ses incessants changements de ton fatiguent) et parvient même à créer quelques beaux moments : une tendre union avec son instrument ; une divagation surréaliste, souliers vernis en guise de mains ; un concerto frénétique joué corps et âme, archet entre les dents.

Si ce huis clos pour artiste paumé et contrebasse nous arrache, en somme, quelques sourires et recèle, aussi, de rares mais poétiques petites scènes, il reste que le spectacle souffre d’un jeu bien trop inégal et des lourdeurs d’une partition qui ressemble bien plus à un exercice de gammes, à une étude maladroitement interprétée qu’à une petite et charmante musique de chambre. À croire que le solo de contrebasse n’est effectivement pas des plus mélodieux. 

Cédric Enjalbert


La Contrebasse, de Patrick Süskind

Mise en scène : Élisabeth Vitali

Avec : Stéphane Bierry

Théâtre de Poche-Montparnasse • 75, boulevard du Montparnasse • 75006 Paris

Du mardi au samedi à 21 h, matinées samedi à 18 h et dimanche à 15 h

Relâche : dimanche soir et lundi

Réservations : 01 45 48 92 97

Prix des places : 20 € | 28 € | 36 €

Durée : 1 h 30

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L
La pièce de Süskind a été interprétée par différents acteurs et passer après Jacques Villeret qui avait magnifiquement endossé le rôle n'est pas chose aisée. Clovis Cornillac s'y est exercé aussi avec brio d'ailleurs ! Chaque acteur et chaque metteur en scène apporte quelque chose de différent à une même pièce, il faut donc la regarder à chaque fois avec un oeil nouveau !
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