Encore veuve !
Par Franck Bortelle
Les Trois Coups.com
Isabelle Mergault, qui triomphe au cinéma avec « Enfin veuve », dont elle a écrit scénario et dialogues et assuré la réalisation, remonte sur les planches pour une histoire où il est aussi question de veuvage. L’ensemble est honnête, plutôt drôle et rythmé, même si une écriture plus soignée n’aurait pas été du luxe. Du bon boulevard.
Coco la Marseillaise n’a jamais vécu que dans une oisiveté que seul le luxe autorise. Elle a enterré trois époux. Apprenant qu’il était ruiné, le quatrième vient de se suicider. Le temps presse pour la veuve : tant que personne n’est au courant de la banqueroute, il lui faut trouver le cinquième mari qui la sortira de cette impasse.
Ne cherchons pas autre chose que le divertissement dans cette histoire où les portes claquent et où les fauteuils se rapprochent électriquement pour mieux favoriser le rapprochement des corps et le jeu de la séduction. Doté de moyens substantiels non négligeables (dix comédiens et un gros décor, véritable personnage à lui tout seul), ce spectacle vise un public qui n’a pas envie de se surcharger cognitivement. Avec une mise en scène énergique, voire athlétique, Croque monsieur n’engendre donc pas la monotonie et séduit par sa bonne humeur.
L’interprétation, sans chercher vraiment à se surpasser, remplit honorablement sa mission. Il faut dire que tout tourne autour de la comédienne principale, omniprésente. Avec le bagout qu’on lui connaît, Isabelle Mergault anime cet imbroglio socio-crimino-matrimonial avec ferveur, dans la droite ligne de celle qui créa ce spectacle il y a plus de quarante ans, l’inoubliable Jacqueline Maillan. La comédienne, décidément en plein veuvage (son nouveau film comme réalisatrice, Enfin veuve, cartonne sur les écrans depuis le 16 janvier), s’accommode à merveille de cette situation macabrement drôle.
On peut regretter toutefois que le texte ne soit pas plus drôle. Les rires ne sont pas au rendez-vous aussi souvent qu’on le souhaiterait et la performance de la comédienne tourne un peu à vide. L’ensemble manque incontestablement de mordant. Tout demeure résolument lisse sur un sujet dont on connaît les comédies parfois grinçantes qu’il a engendrées. Rien n’est épargné pour caresser tout le monde dans le sens du poil, de l’intrigue policière qu’un non-lieu rend inutile au happy end amené sans finesse. L’auteur tire des ficelles grosses comme des cordes à nœuds là où un peu d’élégance et surtout beaucoup d’humour n’auraient pas été superflus. Il aurait donné ainsi à des comédiens globalement motivés de quoi vraiment se surpasser.
C’est donc un spectacle sympathique qu’abrite le Théâtre des Variétés en ce moment. Sympathique, mais pas inoubliable et qui laisse à penser qu’Isabelle Mergault, en respectant l’adage selon lequel on n’est jamais si bien servi que par soi-même, exploserait dans un rôle qu’elle se serait écrit. ¶
Franck Bortelle
Croque monsieur, de Marcel Mithois
Mise en scène : Alain Sachs
Assistante à la mise en scène : Corinne Jahier
Avec : Isabelle Mergault, Julien Cafaro, Alain Sachs, Christian Sinniger, Michel Cremades, Lannick Gautry, Anne-Sophie Germanaz, Tadrina Hocking, Tom Morton, Isabelle Tanakil
Décors : Jacques Voizot et Alain Sachs
Costumes : Pascale Bordet
Lumières : Philippe Quillet
Chorégraphie : Brigitte Mazères
Musique : Patrice Peyrieras
Théâtre des Variétés • 9, rue Montmartre • 75002 Paris
Réservations : 01 42 33 09 92
À partir du 24 janvier 2008, du mercredi au samedi à 21 heures, samedi et dimanche à 16 h 30
Durée : 1 h 45
46 € | 36 € | 24 € | 12 €