In vitro veritas
Par Marie-Christine Harant
Les Trois Coups.com
« In vitro 09 », dernière création du cirque Archaos, met en scène les aventures de clones mutants interprétés par les élèves de l’École nationale de cirque de Rio. Ces jeunes artistes se jouent des chausse-trapes avec une belle maturité et un sens aigu du spectacle. Renversant.
Archaos a planté son chapiteau pendant les vacances de Noël au nord du parc du Château à Montpellier. Alors pourquoi avoir attendu la représentation du 31 décembre 2009 pour aller voir In vitro 09 ? Tout simplement parce que cette dernière avait quelque chose d’exceptionnel. En effet, ce spectacle était proposé dans le cadre d’une soirée réveillon imaginée par Christopher Crimes, directeur de ce domaine départemental. En prélude à la soirée, les spectateurs regroupés dans l’amphi ont assisté à l’éclipse partielle de la treizième lune de l’année, expliquée par l’astrophysicien Denis Puy. Malgré les nuages, le public a pu observer le phénomène à l’œil nu ou à la lunette. Après cette ouverture scientifique, les spectateurs se sont engouffrés sous le chapiteau d’Archaos.
Dans In vitro 09, ils sont neuf très jeunes artistes européens et brésiliens, invités à revisiter un spectacle écrit en 1997 sur le thème d’une expérience de clonage en partie ratée puisque les créatures se retrouvent avec des attributs de volatiles ou de moutons. Malheureusement, on ne comprend l’intrigue que si on a lu auparavant les notes d’intention. En revanche, le thème du double est immédiatement perceptible : Dana Augustina et Ana Carolina Coll, les deux virtuoses du cerceau aérien, en font une démonstration éclatante. De vraies siamoises qui se détachent pour mieux s’affronter. Pendant ce temps, les jumeaux masculins exécutent des acrobaties audacieuses au mât chinois. Ces artistes repoussent les limites de l’art. Dans le public, certains ont le souffle coupé, tandis que d’autres laissent échapper des exclamations de stupéfaction et d’incrédulité.
« In vitro » | © Guillermo Giansanti
En solo, l’antipodiste Jean-Pierre Oliveira de Costa, en équilibre sur sa planche posée sur un cylindre, donne des frissons. Il corse la difficulté en ajoutant des accessoires et en se contorsionnant. Les Chinois excellent dans ce type de performance, mais il va falloir compter avec ce Brésilien, brillantissime. Avec les apparitions de Sarah Trägner en costume rouge, c’est la poésie et la grâce qui viennent calmer l’atmosphère survoltée. La jeune femme se balance sur une double corde molle comme dans un hamac virtuel. Plus tard, elle revient sur un fil pas du tout tendu. Une autre façon de jouer les funambules. Elle est éblouissante.
Les artistes dansent, se bousculent, se bagarrent
On a évoqué l’atmosphère. Elle est créée par le rythme soutenu des enchaînements, mais aussi par la musique inspirée de la techno, du hip-hop et du rap. C’est à cette musique et à cette manière de s’approprier les arts urbains que l’on reconnaît, entre autres, les créations d’Archaos. La mise en scène de Guy Carrara et Raquel Rache de Andrade y fait perpétuellement référence : les artistes dansent, se bousculent, se bagarrent, comme dans les villes les clans rivaux. Cela se situe entre West Side Story et Orange mécanique. Un spectacle total, qui ne l’oublions pas a également pour but l’insertion des jeunes. Un vibrant plaidoyer contre la barbarie.
Après In vitro, d’autres surprises attendaient le public dans le parc : un spectacle créé par Franz Clochard (un ancien d’Archaos), le Chant des sirènes. Imaginez une nuit douce d’hiver bercée par le souffle puissant de ces cornes élevées au rang d’instruments de musique, l’ensemble accompagné d’effets lumière somptueux : vous avez une petite idée de la magie du moment. Comment finir l’année de façon plus féerique ? Les premières heures de 2010 se sont passées dans le grand bassin des naumachies, entouré de pins d’Alep, réchauffé par des braseros, avec le Bar d’as, une autre invention de Franz Clochard, Las Ondas Marteles et D.J. Shalom. Une première totalement réussie, plébiscitée par un millier de personnes. ¶
Marie-Christine Harant
In vitro 09, de Guy Carrara
C.R.E.A.C. • Archaos • 7, rue Gustave-Ricard • 13006 Marseille
04 91 55 61 64 | télécopie : 04 91 55 56 84
Mise en scène : Guy Carrara, Raquel Rache de Andrade
Avec : Luis Sartori do Vale, Luciane Vivas Costa, Dana Augustina, Sarah Trägner, Jonathan Young, Ana Carolina Coll, Anderson Melo, Daniel Élias, Paulo Maeda, Jean-Pierre Oliviera de Costa
Théâtre d’O • rond-point du Château-d’O • 34000 Montpellier
Réservations : 0 800 200 165
Du 26 au 31 décembre 2009 à 21 heures, dimanche 27 décembre 2009 à 19 heures
Durée : 1 heure
12 € | 8 € | 6 €
Tournée
– 20 au 23 janvier 2010, Le Merlan à Marseille
