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11 novembre 2014 2 11 /11 /novembre /2014 20:28

Un festival des sens


Par Jean-François Picaut

Les Trois Coups.com


Pour son 25e anniversaire, Jazz à l’Ouest s’est voulu innovateur. Le voici hébergé au château pour une soirée qui marie le jazz et la gastronomie. Détendez-vous !

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Jean-Yves Leseure et Olivier Nestelhut

© Jean-François Picaut

Pour ses vingt-cinq ans, Jazz à l’Ouest s’est offert la vie de château, l’espace d’un soir. Cela s’est fait avec la complicité du château d’Apigné (Le Rheu, Ille-et-Vilaine), une belle demeure néo-Renaissance, datant du premier tiers du dix-neuvième siècle. Le domaine abrite une hôtellerie et un restaurant particulièrement accueillants, mais c’est dans la serre, superbement rénovée, que se passent les évènements comme celui d’aujourd’hui.

La soirée s’intitule Is It a J.O.C. ? Non, ce n’est pas une plaisanterie. C’est un projet qui allie le jazz, l’œnologie et un cocktail dînatoire. La dégustation de vins, des produits du Val-de-Loire, se fait sous la conduite des sommeliers du Casier à bouteilles, qui réunit quatre établissements dédiés aux vins et spiritueux dans l’agglomération rennaise.

L’accueil dans cet endroit douillet, à l’hospitalité parfaite, est assuré par Mme Valérie Leroux, la directrice de la M.J.C. Bréquigny (Rennes) et le maître des lieux, organisateur de l’évènement, M. Karim Khan‑Renault. La composante musicale a été confiée à Poivre & Cel, un groupe d’amateurs de haut niveau, coutumier de ce style d’animation. Répartie en trois parties, elle encadre les diverses étapes de la dégustation des vins et des mets, soit à peu près l’apéritif, le plat chaud et le moment sucré.

Fantaisie orthographique

Poivre & Cel joue une musique intermédiaire entre le jazz des racines et celui des dernières années. Le groupe est composé de personnes dont on devine l’âge au nom qu’elles ont choisi. Et la fantaisie orthographique du « C » est due à la présence autrefois, dans ses rangs, d’une chanteuse prénommée… Céline. Aujourd’hui, comme le dit Jean‑Yves Leseure, on peut comprendre : « celle qui chante, céleste, célèbre… ». En tout cas, cette entorse à l’orthographe a permis, également, de se distinguer de quelques groupes qui avaient eu la même idée.

Le premier set, conçu pour accompagner le cocktail, est purement instrumental. On pourra regretter qu’il se produit sur un fond de conversations particulièrement bruyant, pour ne pas dire de brouhaha. Les bavards impénitents et peu discrets ne sauront jamais ce qu’ils ont perdu. Le programme était varié et composé de solides standards. J’ai particulièrement retenu On Green Dolphin Street, popularisé par Miles Davis, Nostalgia in Time Square (Mingus), Night Has a Thousand Eyes (Sonny Rollins), In a Sentimental Mood (Duke Ellington), Song for My Father d’Horace Silver, qui nous a quittés récemment. Didier de Kerzerho s’est distingué dans One Note of Samba (Antonio Carlos Jobim). Mais le plat de résistance a été, sans nul doute, le florilège extrait de Kind of Blue, un des albums les plus fameux de Miles Davis (1959), reprenant Freddie Freeloader, Blue in Green (composé avec Bill Evans) et l’incontournable So What. Ce fut l’occasion pour Sylvain Rocher de s’illustrer à la trompette. Évidemment, le héros incontesté de ce premier moment musical a été le leader du groupe, Jean‑Yves Leseure. Le saxophoniste a montré ici tout son talent, qui n’est pas mince.

Après l’intermède du plat chaud, le concert se poursuit. Cette fois, la plupart des participants sont assis et le silence se fait progressivement. Le climat est plutôt « jazzy french touch » et permet à Jean‑Yves Leseure de dévoiler une autre facette de sa personnalité. Le voici chanteur de charme. La voix est celle d’un baryton-basse et n’est pas sans évoquer Guy Marchand. Nougaro se taille la part du lion dans les titres interprétés (Sing Sing Song, Dansez sur moi, La pluie fait des claquettes, etc.), mais on y trouve aussi Henri Salvador (Mademoiselle), Léo Ferré (C’est extra, dans une belle version de Jean‑Yves Leseure), Michel Jonasz et Lavilliers. Cependant, la surprise va venir d’une participante. Anne Onillon, qui jure ne chanter que dans sa salle de bains et pour ses amis, interprète au sens plein du terme les Feuilles mortes de Prévert et Kosma. Dotée d’une jolie voix d’alto, elle semble avoir la pulsation jazz naturelle et sait en outre scatter !

Les mignardises savourées, on revient à la musique avec une troisième partie qui se veut plus swing et invite même à la danse. Olivier Nestelhut (saxophone alto) rejoint Poivre & Cel pour deux titres qui nous valent de beaux solos et de sympathiques duos avec Jean‑Yves Leseure et l’on s’achemine ainsi vers la fin d’une soirée bien remplie.

Pour un coup d’essai, cette première de Jazz à l’Ouest au château d’Apigné est un succès. Un programme varié, bien choisi et interprété avec cœur en est certainement la clef. La satisfaction des organisateurs et du public devrait conduire à renouveler ce type d’évènement. 

Jean-François Picaut


Is It a J.O.C. ?, par Poivre & Cel

Avec : Jean-Yves Leseure (saxophones, flûte traversière, chant), Marc Bachus (batterie), Nicolas Riébel (contrebasse), Sylvain Rocher (clavier et trompette) et Didier de Kerzerho (guitare)

Château d’Apigné • 35651 Le Rheu

Le 10 novembre 2014, de 19 h 30 à minuit

30 € repas compris

Jazz à l’Ouest 2014 à Rennes (Ille-et-Vilaine)

25e édition

Du 4 au 15 novembre 2014

Site : http://www.jazzalouest.com

Billetterie : F.N.A.C. / M.J.C. Bréquigny et salles partenaires

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