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29 septembre 2014 1 29 /09 /septembre /2014 15:13

Une antipréparation
à l’accouchement


Par Céline Doukhan

Les Trois Coups.com


Est-ce cela, la naissance ? Une chose est sûre, la vision ultra-intimiste et intériorisée qu’en donne Clara Cornil n’a rien de rassurant.

noli-me-tangere-300 sylvain-thomas Chorégraphe et interprète, Clara Cornil se propose d’explorer la naissance comme « un passage, un passage initiatique pour la mère et l’enfant, pour le couple. Elle ouvre des dimensions inconnues en chacun. C’est un moment de révélation, de reliance ». Hum, humm… On le voit, le but ne sera donc pas de démystifier l’évènement, façon « préparation à l’accouchement », mais plutôt de plonger dans son mystère essentiel.

Le résultat est un spectacle plutôt aride, fait de lenteur et de silences ponctués de séquences de gestes vifs et répétés. La première partie pourrait se dérouler dans un ascenseur : Clara Cornil reste debout, les pieds ne bougeant pas d’un iota, pendant une demi-heure. C’est tout le haut de son corps qui, en revanche, déploie des ondulations tantôt presque imperceptibles, tantôt quasi mécaniques, en saccade.

Ces mouvements ne miment jamais l’accouchement. Le seul moment qui paraît représenter clairement quelque chose, peut-être le plus beau de Noli me tangere, se produit lorsque l’artiste, accroupie, les cheveux renversés vers l’avant, fait progressivement descendre ses mains en cercle autour de son crâne, symbolisant ainsi l’apparition tant attendue de la tête du bébé.

Nous sommes perplexes

Une atmosphère encore plus ascétique enveloppe la deuxième partie, dans laquelle la danseuse évolue entièrement nue sous des lumières ocres parfois très faibles. Clara Cornil fait alors quelques pas puis s’allonge, soulève un coude, un genou, le pied, tourne le front… Et cela prend un temps infini. Qu’évoquent ces gestes d’une lenteur extrême, ces figures tordues, tenues pendant ce qui semble être de longues minutes ? Ce mode d’expression pourra sans doute toucher certains spectateurs, mais nous, nous sommes perplexes.

La bande-son originale, créée par Pierre Fruchard, tend résolument vers le dépouillement et l’abstraction, achevant de nous éloigner de toute forme de réalisme voire de sentiment. Même, elle a plutôt des accents anxiogènes (par exemple, lors de ce fameux moment de la naissance proprement dite), et ce n’est que vers la fin qu’elle nous offre un répit, presque un soulagement, quand résonnent des voix d’anonymes qui parlent des premiers instants de la relation entre la mère et le nouveau-né.

Telle est la proposition radicale de Clara Cornil, dont la sincérité et l’engagement ne font aucun doute. On lui reconnaît sans peine le grand mérite de ne pas avoir cédé à la facilité sur un thème qui aurait pu être traité avec beaucoup moins d’exigence. Interprète, elle donne beaucoup d’elle-même. On devine que sa prestation est le fruit d’une exploration intérieure approfondie, et qui ne fait pas l’impasse sur les incertitudes et les peurs d’une femme face à un tel bouleversement. 

Céline Doukhan


Noli me tangere, de Clara Cornil

Compagnie Les Décisifs

Chorégraphie et interprétation : Clara Cornil

Création sonore : Pierre Fruchard

Création lumière : Jean-Gabriel Valot

Regards extérieurs : David Subal, Anne Journo

Photo : © Sylvain Thomas

Théâtre des Quinconces • place des Jacobins • 72000 Le Mans

www.quinconces-espal.com

Réservations : 02 43 50 21 50

Le 25 septembre 2014 à 12 h 30 et 19 heures, le 26 septembre à 12 h 30

Durée : 50 minutes

8 €

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